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Harvey P. Weingarten — Assurance de la qualité : Un concept simple que nous compliquons trop

Harvey P. Weingarten, Président-directeur général

Si vous lisiez tout ce qui a été écrit au sujet de l’assurance de la qualité dans l’enseignement supérieur, vous pourriez penser qu’il s’agit d’un concept et d’un processus compliqué, nuancé, ardu et complexe qui ne peuvent faire l’objet d’une mesure rigoureuse, et qu’il faudra au moins une décennie pour remédier à cette situation.

J’aime à dire qu’il y a peu de mystères dans la vie et que la mesure et l’assurance de la qualité de l’enseignement supérieur ne font pas exception. Au contraire, ces processus sont très simples. Permettez-moi de vous les expliquer.

Nous élaborons des programmes d’études pour que les étudiants apprennent ce que nous jugeons être important, les connaissances et compétences que nous jugeons nécessaires. Que sont la qualité et l’assurance de la qualité? Il s’agit simplement de mesurer si les étudiants inscrits ont réellement acquis les connaissances et les compétences que les programmes prétendent enseigner.

Il serait présomptueux de ma part de dire aux concepteurs des programmes quel contenu et quelles compétences sont importants. Je laisse ce soin aux experts de la discipline. Mais si je veux savoir ou vérifier s’ils ont mis au point un programme de qualité, je n’ai qu’à m’assurer que le programme a réussi à enseigner ces connaissances et ces compétences aux étudiants qui l’ont achevé.

Cette méthode simple d’assurance de la qualité ne pose aucun problème pour ce qui est du contenu. Les professeurs passent beaucoup de temps à enseigner le contenu qu’ils jugent important, à évaluer si les étudiants ont intégré ce contenu et à déterminer la quantité de contenu que les étudiants ont acquis en leur attribuant une note de cours qui figure sur un relevé de notes officiel. Pour une raison quelconque, tout se brouille et se complique lorsque l’on examine les compétences comme la pensée critique, la communication et la littératie. Nous affirmons vouloir enseigner ces compétences aux étudiants et nous ne manquons pas d’éducateurs et d’administrateurs prêts à affirmer, souvent sans grande preuve, qu’elles sont acquises. Mais les affirmations sont, ou devraient être, insuffisantes pour un système d’assurance de la qualité sensé et sérieux. L’essence de l’assurance de la qualité est d’évaluer, grâce à des mesures réelles, si ces compétences sont effectivement acquises.

Au lieu de cette approche simple et directe de l’assurance de la qualité, nous avons conçu des processus bureaucratiques et lourds sur le plan administratif, qui mesurent toute une gamme d’éléments qui peuvent ou non refléter la qualité d’un programme, comme les ressources des bibliothèques, le nombre d’enseignants possédant un doctorat dans un programme, le nombre de cours, la présence ou l’absence d’un volet expérientiel, la durée du programme, etc. Cela a engendré d’importantes lourdeurs administratives qui tuent de nombreux arbres et emploient beaucoup de personnes, mais qui ne permettent à personne, surtout à un sceptique à l’esprit critique, d’être certain de la qualité du programme examiné. L’approche actuelle en matière d’assurance de la qualité revient en quelque sorte à évaluer si les étudiants ont acquis les concepts et le contenu qu’un programme est conçu pour enseigner en mesurant la durée de leurs réponses à un examen ou le type de stylo qu’ils ont utilisé.

Je m’intéresse particulièrement au problème de l’assurance de la qualité parce que mon collègue, Martin Hicks, et moi-même avons récemment assisté à une conférence des chercheurs sur le processus de Bologne (pour consulter le document que nous avons présenté sur la mesure du rendement, cliquez ici), durant laquelle nous avons beaucoup entendu parler de l’assurance de la qualité. J’ai été impressionné par le fait qu’on accorde tellement d’attention au sujet, mais que l’on ne réalise que si peu de progrès mesurables en Europe dans ce domaine (du moins si l’on en croit les documents présentés lors de la conférence). Beaucoup de discussions sont encore en cours sur ce qu’est la « qualité » dans l’enseignement supérieur (quelques commentateurs lucides étant prêts à admettre que personne ne le sait vraiment, ou du moins qu’il n’y a pas de consensus) et on réalise encore des analyses sans fin frôlant le talmudique de la façon de classer différents régimes d’assurance de la qualité dans différents pays, de ce qui constitue une bonne mesure de la qualité, des cadres d’acquisition des compétences, et des inventaires des résultats d’apprentissage. J’estime que la discussion en Amérique du Nord a heureusement dépassé ce stade pour se concentrer sur le rôle essentiel de l’évaluation, plus précisément sur la façon de déterminer si les compétences et les résultats souhaités sont réellement obtenus. J’aimerais renvoyer les lecteurs à l’approche du National Institute for Learning Outcomes Assessment aux États-Unis et vers celle que le COQES a adoptée à titre d’exemples d’évaluation directe. Il existe des critiques fondées à propos de notre façon de gérer l’assurance de la qualité en Ontario. Je suis toutefois d’avis que la Province reconnaît au moins que l’évaluation adéquate de la qualité exige de mesurer si les résultats d’apprentissage souhaités ont été atteints. Au printemps, nous rendrons compte des résultats d’un vaste essai mené en Ontario, qui a utilisé une version en ligne du PEICA de l’OCDE pour mesurer les gains d’apprentissage liés aux compétences en littératie, numératie et résolution de problèmes chez les étudiants des collèges et des universités entre le moment où ils commencent leur programme et l’obtention de leur diplôme.

Et puisque c’est la saison, voici deux de mes résolutions pour le Nouvel An concernant l’assurance de la qualité dans l’enseignement supérieur.

Tout d’abord, je continuerai de préconiser l’idée simple que l’assurance de la qualité ne consiste qu’à mesurer l’acquisition des connaissances et des compétences qu’un programme a été conçu pour enseigner et développer. Et je soutiendrai que les processus et les organismes d’assurance de la qualité devraient se concentrer sur cette évaluation et se débarrasser de la paperasserie volumineuse et de l’administration qui accompagnent la collecte de renseignements indirects et de substitution qui apportent peu de preuves de la qualité.

Deuxièmement, j’arrêterai d’utiliser le terme « résultats d’apprentissage ». Ce terme rebute bien des personnes, à raison, parce qu’elles l’associent à toute l’industrie qui a émergé et qui développe des cadres de qualification des titres de compétence et des exercices de mise en correspondance qui relient les compétences aux cours et aux programmes. Je m’en tiendrai plutôt au point essentiel : comment mesurer et qualifier les compétences que les étudiants devraient selon nous acquérir dans le cadre d’un programme d’études postsecondaires. Alors, attendez-vous à ce que je dise « mesure des compétences » et continuez de vous attendre à ce que le COQES consacre beaucoup d’attention et de ressources à la collaboration avec d’autres personnes pour trouver des moyens de bien réaliser cette tâche.

Merci d’avoir pris le temps de me lire.

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